60 jours après le début de ses activités, la Task force sur la dette mis en place par le Président du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) a livré un rapport d‘étape. Ce rapport dresse un tableau sombre dénonçant des irrégularités criardes dans l’exécution des marchés publics. Plus grave encore, on constate pour le déplorer des surfacturations surréalistes, des dépassements budgétaires et du favoritisme à n’en plus finir.
Le lancement de la Task force sur la dette restera sans doute l’une des mesures phares de Brice Oligui Nguema, tant les révélations du rapport d’étape des 60 jours de Pierre Duro et ses hommes est accablant. On comprend mieux pourquoi la dette de l’État vis à vis de plusieurs entreprises, notamment celles opérant dans le secteur du BTP est explosive. Ce rapport d’étape révèle des surfacturations à couper le souffle, des détournements de fonds publics et le manque de sérieux des sociétés adjudicataires qui ont grugé l’État sans se soucier du mal qu’elles peuvent faire aux populations gabonaises.
Surfacturations et dépassements budgétaires : c’est l’hécatombe !
Les exemples sont concrets et choquants. Sur le chantier du «stade d’Oyem», l’équipe de Pierre Duro relève un dépassement budgétaire de 47%, passant de 45 à 66 milliards de francs CFA, dû à une «surévaluation manifeste des quantités et des coûts unitaires». Concernant la «route Ndjolé-Medouneu», le rapport cite «des surfacturations de l’ordre de 2,8 milliards de francs CFA sur les seuls marchés de gros œuvre, soit près de 30% du montant initial». Ou encore, sur le projet de «réhabilitation des voiries de Libreville», la taskforce épingle «des prix au mètre carré anormalement élevés ayant occasionné un surcoût de 12 milliards de francs CFA».
Graves irrégularités dans l’attribution des marchés
En parcourant un peu plus ce rapport, les révélations fracassantes n’en finissent pas. Pierre Duro et l’équipe qu’il dirige mettent en lumière de «graves irrégularités» dans l’attribution du marché de «fourniture de médicaments génériques au CHU de Libreville», citant «des différences de prix de 200 à 300% par rapport aux prix pratiqués dans la sous-région». Abordant, entre autres, le contrat de «rénovation des lycées techniques», l’étude dénonce «l’absence totale de mise en concurrence et de publicité préalable pour un montant de 9,5 milliards de francs CFA»
S’agissant des travaux de construction du lycée technique de Gamba, d’un montant initial de 12 milliards FCFA, la taskforce pointe «un dépassement budgétaire final de 3,5 milliards ne correspondant à aucune nécessité technique démontrée». Quant au Plan de relogement des personnes déplacées par l’aménagement des bassins versants de Gué-Gué et Terre-Nouvelle (20 milliards FCFA), le rapport dénonce «l’acquisition de parcelles à des prix 3 fois supérieurs à leur valeur réelle». Tandis que sur le projet d’eau potable du Grand Libreville (58 milliards FCFA), des «surfacturations sur les fournitures de tuyaux» sont mises en avant, avec «des écarts de prix de 45 à 60% par rapport aux prix du marché».
Ces entreprises qui grugent l’État au quotidien !
Une dizaine d’entreprises sont pointées du doigt par la Task force. Il s’agit entre autres de la société «Raza» qui est citée pour son contrat de fourniture de véhicules à la Présidence, avec des «majorations de prix allant jusqu’à 46%». La compagnie «Galaxy Corporation» est épinglée pour la rénovation de bâtiments administratifs, avec «des devis surévalués de 32 à 59%». L’entreprise «Proxima» se voit reprocher des facturations excessives dans le cadre de son marché de fourniture de matériel informatique au ministère de l’Éducation nationale. Enfin, la taskforce relève de «graves anomalies» dans le contrat obtenu par la société «ATIC» pour la construction de logements sociaux à Franceville. L’attribution même de ce marché fait l’objet de «soupçons de favoritisme».
Pour la Task force, il est plus que jamais important que les nouvelles autorités du pays renforcent les contrôles sanctionnent durement les responsables de ces dérives financières pour en faire des jurisprudences qui dissuaderaient le plus grand nombre.