Si d’aucuns, sur les réseaux sociaux, continuent d’exprimer leur rejet de la disposition du Code pénal visant la dépénalisation de l’homosexualité en République gabonaise, nombre des détracteurs de la future loi confondent et se représentent cette dépénalisation comme la légalisation d’une pratique jusque-là interdite au Gabon. Ils se trompent, d’autant plus que dépénaliser n’est nullement synonyme de légaliser.
Ces dernières heures, l’Assemblée nationale a repoussé à la prochaine session le vote sur la disposition du nouveau Code pénal portant dépénalisation de l’homosexualité en République gabonaise. Ce qui veut dire que le débat sur ce sujet ayant déchaîné les passions sur les réseaux sociaux n’est pas encore clos. En prélude à sa réouverture, certains s’interrogent et avouent leur incompréhension devant le tollé suscité par le projet porté par le gouvernement qui n’est en rien contraire aux us et coutumes du pays.
En effet, alors que le débat semble prendre d’autres directions, avec la politisation facile que l’on connaît au Gabon, certains aiment à préciser que le projet présenté par le Premier ministre Julien Nkoghe Bekale à l’Assemblée nationale ne vise pas à légaliser l’homosexualité qui reste une pratique non officielle à ce jour, en plus d’être contraire aux croyances africaines. Seulement, ayant ratifié et signé plusieurs textes internationaux garantissant les droits et les libertés des individus, il serait illogique de voir le Gabon maintenir la pénalisation de l’homosexualité.
Or, en dépénalisant l’homosexualité, le gouvernement reconnait à chacun le droit d’avoir l’orientation sexuelle de son choix et ne pas condamner à une peine de prison ou à une amende pour cette orientation sexuelle. C’est donc une façon de garantir la protection, vis-à-vis du regard extérieur, des personnes jugées « différentes » de la grande majorité, plus forte, plus puissante. « Avant le vote de la loi par le Sénat en décembre 2018, il n’y avait pas de dépravation de mœurs et il n’y en aura pas plus après la dépénalisation », se souvient d’ailleurs un commentateur.
Selon certains experts psychologues, en effet, « la pénalisation a introduit une forme de discrimination à l’endroit de certains compatriotes, ce qui est contraire à l’esprit de notre hymne national ». Comment donc assurer de l’unité des Gabonais dès lors qu’on exclut ? Comment garantir la fraternité du peuple gabonais dès lors qu’on punit pour une orientation qui a cessé d’être un crime dans de nombreux pays à travers le monde ? Où en est la « concorde » clamée depuis plusieurs décennies et qui donne son nom à notre hymne national ?
En faisant le choix de la dépénalisation de l’homosexualité, le gouvernement prend certes le risque de fâcher la population, il prend surtout une sérieuse option pour le Gabon qui ne manquera pas de gagner de précieux points auprès de la Communauté internationale et des agences de notation. Des points qui auront sans conteste des répercussions sur l’intérêt des investisseurs internationaux.
Que cela soit dit enfin : contrairement aux dires de certains, la dépénalisation l’homosexualité n’est nullement une façon de préparer le « mariage pour tous » ou la légalisation de l’adoption pour les couples de personnes de même sexe.